Quatre coureurs étaient au-dessus du lot pendant ce week-end des Championnats de Luxembourg de cyclisme sur route à Berbourg: Bob Jungels, Christine Majerus, Kevin Geniets et Michel Ries ont en effet réalisé le doublé contre-la-montre et course en ligne dans leurs catégories respectives, et avec la manière en plus. Christine Majerus a écrasé la concurrence dans la course en ligne dames en s'imposant avec plus de huit (!) minutes d'avance, Michel Ries a réalisé deux courses formidables, avoisinnant les moyennes des pros dans le chrono malgré un développement limité et dans la course en ligne espoirs/élite, à 19 ans à peine, Kevin Geniets a réalisé la prouesse d'accompagner les pros jusqu'au bout du suspense. Car suspense il y a eu dans un des championnats pros les plus passionnants de ces dernières années, Jungels devant attendre les tous derniers kilomètres pour s'imposer, avec autorité toutefois.
Le circuit autour de Berbourg ainsi que des distances relativement faibles ont finalement fait l'unanimité: pas trop dur, mais plus usant que l'on n'y pensait à première vue, le tracé a donné lieu à des courses passionnantes, à commencer par l'épreuve des élites/espoirs, le dimanche après-midi. La pluie qui a accompagné les coureurs tout-au-long du week-end avait enfin cessé d'harceler son monde et, sous les premiers rayons de soleil, les pros ont enclenché la quatrième vitesse dès le premier des huit tours à accomplir, provoquant d'emblée la sélection. Ils étaient 11 à se détacher donc après quelques kilomètres de course pour s'installer durablement en tête de la course: les élites avec contrat au grand complet (Jungels, Drucker, Schleck, Kirsch, Gastauer et Tom Thill) ainsi que les espoirs Kevin Geniets, Luc Turchi, Tiago Da Silva, Ivan Centrone et Jan Petelin. Suivait ensuite un deuxième groupe avec les élite sans contrat les plus costauds (Mike Diener, Tim Diederich, Pol Weisgerber, Philippe Herman, Lex Reichling) ainsi que les espoirs Larry Valvasori et Pit Leyder, puis, une trentaine de secondes plus loin, le peloton principal d'une trentaine d'unités avec, notamment, Pascal Triebel, Gusty Bausch ou Christian Helmig, pour ne citer que ceux-là.
Les positions étaient donc prises, mais la course demeurait passionnante: devant, Jempy Drucker devait essuyer un bris de chaîne et il a perdu momentanément le contact avec le groupe de tête, au même moment que se faisaient distancer après une nème accélération les espoirs Centrone, Turchi, Petelin et Da Silva, Geniets restant cependant au contact des pros. Heureusement, les rivaux de Drucker n'ont pas insisté et le coureur BMC a su revenir devant après une course-poursuite courte, mais intense. Un peu plus loin, chez les élite sans contrat, le suspense était également encore intact, le deuxième groupe avec les Triebel, Dostert, Weyrich, Reuland, Laterza ou Bausch restant à moins de deux minutes du groupe de tête de leur catégorie, emmené plus souvent qu'à son tour par Tim Diederich.
A une quarantaine de kilomètres du but, Alex Kirsch est passé à l'attaque et, craignant une course tactique en sa défaveur, Jempy Drucker a effectué le saut: à la surprise de la plupart des observateurs, les deux meilleurs sprinters du groupe se sont donc installé en tête de la course avec une quarantaine de secondes d'avance sur leurs poursuivants, encore au nombre de cinq (Schleck, Jungels, Gastauer, Geniets et Thill, auteur d'une excellente course). Mais Alex Kirsch craignait trop la pointe vitesse de Drucker et il n'a cessé d'accélérer dans les bosses, causant la perte de Drucker qui avait déjà dû fournir beaucoup d'efforts jusque-là. Il s'est laissé rétrograder vers les prochains poursuivants, avant de disparaître également de ce groupe sur crevaison un peu plus loin. Kirsch a entamé le dernier tour de 17 kilomètres autour de Berbourg avec une trentaine de secondes d'avance sur les poursuivants emmenés par Schleck et Drucker notamment.
Un peu plus loin, c'en était finie avec l'échappée du sociétaire de Stölting et, alors qu'il restait deux bosses à franchir, ils étaient encore cinq à pouvoir prétendre au titre: Frank Schleck, Ben Gastauer, Alex Kirsch, Tom Thill et Bob Jungels, étonnament discret jusque-là. Le malheureux Tom Thill s'est fait éliminer sur un ennui mécanique un peu plus loin, alors que Ben Gastauer était passé à l'attaque. Bob Jungels a lancé un contre puissant s'est installé seul en tête de la course, avec 50, puis 100, puis 200 mètres d'avance. Derrière, ils avaient déjà effectué pas mal d'efforts et le formidable rouleur Bob Jungels était parti pour la gagne: 39 secondes d'avance à l'arrivée sur un groupe de trois où Alex Kirsch s'est imposé pour la médaille d'argent, devant Frank Schleck et Ben Gastauer. A peine trois secondes plus tard, Kevin Geniets a pris la cinquième place de la course en remportant le titre national chez les espoirs, une quinzaine de minutes (!) devant les Differdangeois Jan Petelin et Tiago Da Silva, en duo depuis une centaine de kilomètres.
La course des élite sans contrat s'est finalement terminée dans un sprint à quatre, Philippe Herman pensant l'avoir emporté avant de se raviser, en attente du visionnage du photo-finish. Celui-ci attribua le titre à Pol Weisgerber, fou de joie, devant le Tétangeois Herman et le tenant du titre, Mike Diener du Tooltime Preizerdaul.
Plus tôt dans la journée, Michel Ries nous avait déjà gratifié d'un gros numéro chez les juniors, en l'emportant avec plus de deux minutes d'avance sur ses prochains poursuivants, Ken Conter et Misch Leyder. Pourtant, la course n'avait pas commencé de la meilleure des façons pour le favori numéro un puisqu'il n'avait pas pu intégrer le premier groupe de poursuivants qui roulait derrière les deux premiers échappés du jour, Misch Leyder et Felix Keiser. Les deux coureurs avaient attaqué le peloton dès le premier tour et ils se sont octroyé un bel avantage de près de deux minutes sur un groupe de quatre poursuivants qui comprenait Ken Conter, Colin Heiderscheid, Tristan Parotta et Felix Schreiber. Le peloton principal se trouvait à plus de trois minutes des hommes de tête mais, avec pas moins de trois coéquipiers de l'UC Dippach devant lui, Ries n'avait pas encore de quoi s'affoler. Dans le troisième tour, alors que Felix Keiser montrait des signes de faiblesses en tête de la course et devait décrocher, plusieurs contres ont secoué le peloton et cinq hommes sont parvenus à faire la jonction avec le premier groupe: Ries évidemment, mais également Chris Johanns, Luc Wirtgen, Raphael Kockelmann et Samuel Fernandes.
Un peu après la mi-course, Misch Leyder se trouvait donc seul en tête de la course, avec une bonne minute d'avance sur Conter qui avait contré chez les poursuivants et un peu plus sur un groupe de neuf: les cinq Dippachois Heiderscheid, Parotta, Ries, Wirtgen et Keiser, le Cessangeois Johanns, le Tétangeois Fernandes et Schreiber, du Tooltime Preizerdaul. Michel Ries n'a pas attendu longtemps pour accélérer à nouveau, laissant tout le monde derrière lui, et il a rapidement fait la jonction devant où ils se sont donc retrouvés à trois au son de cloche: Misch Leyder, en tête de la course depuis le premier tour, Ken Conter et Michel Ries. Celui-ci ne voulait pas attendre le sprint et il a placé une attaque dans la première des quatre bosses de l'ultime boucle, s'isolant seul en tête à l'approche des dix derniers kilomètres. Derrière, Leyder et Conter étaient au bord de la rupture et, en 10 kilomètres à peine, le Dippachois leur a mis plus de deux minutes dans la vue pour s'imposer avec autorité, prenant le temps de savourer le doublé. Michel Ries s'impose donc devant Ken Conter et un Misch Leyder archi-cuit, qui n'avait plus les forces de sprinter pour la médaille d'argent. Colin Heiderscheid et Tristan Parotta ont complété le triomphe des coureurs de Dippach en prenant les positions 4 et 5 à l'arrivée.
Le samedi après-midi, entre rafales de pluie et timides éclaircies, la la course des dames étaient évidemment au centre de l'attention avec une question, une seule: comment Christine Majerus, la favorite numéro un de la course au titre, aurait-elle digéré la chute et la blessure au coude endurée au Tour de Grande-Bretagne, et pouvait-elle s'imposer par des conditions météorologiques si difficiles? Et bien, celle qui fait partie du Top 10 du cyclisme mondial féminin n'a pas attendue longtemps pour donner la réponse: dès le premier des neufs tours de circuit, elle a accéléré dans la principale bosse du parcours pour tester ses adversaires qui, évidemment, n'avaient d'autre occupation que de tenir sa roue le plus longtemps possible. Majerus ne voulant pas aller au sprint à cause de son coude abîmé, elle a remis cela deux tours plus loin, mais cette fois-ci avec plus d'autorité: la multiple championne nationale s'est envolée pour un long raid solitaire d'une bonne quarantaine de kilomètres, devant un groupe de sept qui comprenait notamment Chantal Hoffmann, Natalie Lamborelle, Elise Maes et Anne-Sophie Harsch, principales outsiders de la course. Tour après tour, Christine Majerus a augmenté son avance pour terminer avec plus de huit minutes d'avance sur un groupe de poursuivantes résignées, conscientes de courir pour les accessits. Ceux-ci se sont décidé au sprint du groupe des sept, Chantal Hoffmann faisant parler sa pointe de vitesse aux dépens de Nathalie Lamborelle, habituée des podiums elle-aussi. Les jeunes Claire Faber et Anne-Sophie Harsch ont pris les prochaines positions, se partageant ainsi le podium des dames-juniors avec Edie-Antonia Rees, elle aussi présente dans le premier groupe de cette course commune avec les dames-élite.
En même temps que les dames, les débutants avaient également pris leur départ, un envol ultra-rapide puisque les coureurs du VC Schengen et du Tooltime Preizerdaul notamment ont attaqué dès le coup du pistolet. Ils étaient encore une dizaine ensemble seulement après le premier des sept tours de course, parmi-eux deux coureurs venus de Mondorf (Nothum, Kirsch) et de Schengen (Pries, Kluckers) ainsi que un représentant respectivement du LC Kayl (Rodrigues), du VC Diekirch (Leyder), du Velo Woolz (Brust), du LG Alzingen (Kess), du Tooltime Préizerdaul (Bettendorff) et du UC Dippach (Jeromito). Le rythme restait élevé par la suite, plus de 40 km/h de moyenne pour ces jeunes qui étaient beaucoup plus rapides par exemple que les coureurs masters, sur le même circuit. Arthur Kluckers notamment était très actif en tête de la course et il a accéléré à deux tours de l'arrivée, se faisant rattraper par quatre autres coureurs, dont son coéquipier Cedric Pries. Malgré bon nombre d'attaques encore dans le dernier tour, ces 5 coureurs se sont disputés la victoire au sprint pour un doublé du VC Schengen, Arthur Kluckers l'emportant devant Cédric Pries et Gilles Kirsch, de Mondorf. Le titre des jeunes femmes de cette catégorie s'est également disputé au sprint, Elisa Kockelmann l'emportant devant Laetitia Maus et, un peu plus loin, Cecilia Rees.
Les coureurs minimes et cadets ont pris leur départ sous la pluie et, après quelques chutes, les deux pelotons étaient déjà ébranlés dans le premier tour, se scindant en plusieurs morceaux. Un premier groupe d'une dizaine de coureurs a pris les commandements dans chaque catégore et, si le petit peloton de tête s'est encore effrité chez les plus jeunes, le titre chez les cadets s'est bel et bien décidé au sprint du groupe, Charles Dax s'imposant avec plusieures longueurs d'avance sur Thierry Majerus et Jérôme Jentgen. Dans un deuxième petit peloton à 4 minutes, Lis Nothum et Marie Schreiber ont remporté les médailles d'or et d'argent chez les filles, Jil Langer terminant bien plus loin à la troisième place. Chez les minimes, le titre s'est décidé à trois dans la dernière ligne droite, Mathieu Kockelmann l'emportant assez aisément pour compléter l'impressionnante collection familiale de médailles sur ces championnats, devant Kim Bintz et Mil Morang. Caroline Reuter, Liv Wenzel et Lena Carier ont occupé le podium dans cet ordre chez les filles de la catégorie minimes.
En début d'après-midi, les masters avaient certainement les conditions de courses les plus difficiles: quelques minutes à peine avant le départ, le ciel a ouvert ses portes et déversé des tonnes d'eau sur la chaussée, les courants de boue dévalant des champs avoisinnants pour traverser la route par endroits. Malgré cela, il n'y a pas eu d'incidents majeurs et les aînés du peloton nous ont montré une belle course, avec Pascal Ley comme élément offensif récompensé pour son courage à la fin du compte. Après sa victoire dans le contre-la-montre, le vice-champion sortant Daniel Bintz faisait certainement office de favoris numéro un mais, tout le monde se méfiant de sa pointe de vitesse, la course est rapidement devenue tactique. Les attaques se sont succédées donc et, vers la mi-course, ils étaient encore une petite douzaine à pouvoir prétendre au titre, parmi-eux Bintz, Prado, Mezzapesa, Kohnen, Ley, Zirnheld, Vanek ou Micolino, les suspects usuels. Pascal Ley était parmi les plus offensifs et il s'est échappé du groupe de tête à trois tours de la fin, avant de se faire reprendre un peu plus loin. Le coureur du VC Diekirch a récidivé dans le dernier tour et cette fois-ci, c'était la bonne: personne ne voulait ramener Bintz et Pascal Ley s'est donc imposé en solitaire, 19 secondes devant un petit groupe de 10 coureurs réglé au sprint par Daniel Bintz devant Sergio Prado.
Dans les épreuves de contre-la-montre, le vendredi, s'il y a eu des surprises pour certaines places d'honneur, il n'y a guère eu de suspense dans la plupart des catégories. Chez les pros, le spécialiste Bob Jungels était archi-favori et, si la distance relativement courte et la deuxième partie de parcours avec deux belles relances n'étaient pas pour déplaire à Jempy Drucker, on voyait mal comment le coureur BMC pouvait en venir à bout du maillot blanc du dernier Tour d'Italie. Les deux favoris sont partis très fort, à plus de 70 kilomètres à l'heure sur la première partie du circuit où de longs virages nécessitant la présence des mains sur les cocottes les empéchaient pourtant de garder la position la plus aérodynamique en permanence. Suivaient la petite côte et puis la partie un peu vallonnée du parcours, où Bob Jungels a également fait grosse impression en faisant grimper le tachymètre à près de 60 km/h à nouveau dès le sommet atteint. A la fin du premier tour, le coureur de chez Etixx-Quick Step avait 17 secondes d'avance sur un Drucker qui limitait bien les dégâts et une vingtaine de secondes du plus sur Alex Kirsch, qui trouvait également un parcours à sa mesure entre Berbourg et Manternach. La deuxième boucle n'a pas changée grand-chose, si ce n'est que les écarts ont doublé, et Bob Jungels s'est finalement imposé en 17'44" pour les quinze kilomètres, soit une moyenne de près de 51 km/h. A 33 secondes et à 49 km/h de moyenne, Jempy Drucker a donc pris la deuxième place comme l'année dernière, mais en réduisant de manière drastique son retard l'ancien et nouveau maillot tricolore, par rapport à il y a douze mois. Alex Kirsch a terminé troisième du chrono de Berbourg à près d'une minute, devant le courageux Tom Thill du team Differdange. Chez les dames, la favorite était aussi désignée que chez les hommes et elle s'est imposée sans discussion, avec près d'une minute d'avance sur la jeune Anne-Sophie Harsch, invitée-surprise sur le podium. Si Majerus a pu douter de son état de forme après une grosse chute survenue il y a une semaine tout juste au Tour de Grande-Bretagne, elle s'est rassurée en vue de la suite de la saison en s'imposant avec une belle moyenne proche des 45 km/h malgré des conditions météorologiques délicates. A 18 ans à peine, Anne-Sophie Harsch fait encore partie de la catégorie juniors, mais c'est elle qui a le mieux limité les dégâts, quelques secondes devant Elise Maes et Chantal Hoffmann, l'autre pro du peloton féminin luxembourgeois. Dans les autres catégories, les favoris se sont imposés également: Kevin Geniets avait 18 secondes d'avance sur Luc Turchi et près d'une minute sur Jan Petelin, tandis que Michel Ries a épaté tout le monde chez les juniors en réalisant une moyenne exceptionnelle de près de 48 km/h sur un parcours qui, dans sa première partie légèrement descendante, favorisait pourtant les gros braquets. Avec un développment limité et à moins de trente secondes du médaillé d'or, Raphael Kockelmann et Tristan Parotta ont également réalisé des superbes prestaions sur les positions deux et trois, toujours à plus de 46 km/h de moyenne. Chez les élite sans contrat et les masters enfin, qui ont ouvert le bal en fin d'après-midi, Daniel Bintz et Christian Poos ont reconduit leur bail d'il y a un an en l'emportant avec une quinzaine de secondes d'avance sur Steve Moog et Oliver Zirnheld d'un côté, sur Tim Diederich et Mike Diener de l'autre.
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